Dénomination de l’édifice : Ancien presbytère Titre courant : Ancien presbytère alias Le Monastère (Ca 1934)
Archives Départementales 49 – Juigné-sur-Loire – 3 p 4/ 173 /4
La bâtisse actuelle résulte d’évolutions architecturales successives dont les premières traces remontent au 26 juillet 1493, date de son acquisition par le curé de Juigné, messire Jacques de Chateaubriand, seigneur de Challain et Archiprêtre de Saumur, lors de la vente par Jean de Lespine et sa femme Philippe (1).
L’acte notarié fait alors état d’une maison avec cheminée, attenante à une perrière et au cimetière, ainsi qu’une maison avec pressoir et les alentours du vieux Louet à vocation de pêcherie.
De cette date et jusqu’à la révolution, les bâtiments et leur entourage furent dédiés à un usage presbytéral. Le nombre élevé de 60 paroisses rattachées à l’Archiprêtre de Saumur, assurait des revenus confortables au propriétaire de l’édifice.
Les trois siècles qui suivirent virent la réalisation de nombreux travaux d’aménagement, restauration et extension, modifiant significativement les extérieurs et intérieurs.
Ainsi les deux bâtiments d’origine, imparfaitement alignés, furent-ils initialement réunis par une tourelle en poivrière avec escalier en colimaçon ; selon le style de l’époque, les ouvertures comportaient des huis en accolade et croisées à meneaux, tandis que de vastes cheminées ornaient les intérieurs.
Ces éléments, aujourd’hui disparus, laissèrent la place à des aménagements majeurs intégrant les nouveautés de style Louis XV et uniformisant les façades de cet ensemble à ligne brisée.
La tourelle fut ainsi remplacée par un large escalier intérieur en schiste d’ardoise, des linteaux en arc surbaissé, dits en chapeau de gendarme, surplombant les entrées, fenêtres et lucarnes. Des cheminées de grand style furent dressées par Jean de Saint Simon, élève du célèbre sculpteur Biardeau, des poutres et solives d’acacia soutenant les plafonds.
A la suite de la grande crue et de la débâcle de la Loire en 1711, les murs de l’enceinte furent renforcés par l’édification de quatre tourelles flanquantes.
Parmi les propriétaires qui suivirent, les personnalités en ayant marqué l’histoire, furent M Eustache Fleury Carrefour de la Pelouze, Archiprêtre de Saumur et Curé de Juigné (1747-1774) puis Jean André Loir-Mongazon (1761-1828) successivement curé jureur, démissionnaire, militaire, puis notaire (1806-1828) et maire de Juigné (1803-1815) ; enfin Millicent Sutherland-Leveson-Gower, Duchesse de Sutherland (1867-1955), qui fit aménager les extérieurs.
L’ancien presbytère et ses jardins – Musée du Patrimoine de France
E.F. Carrefour de la Pelouze fit agrandir l’aile est du bâtiment (1747-1761) avec une extension surélevée de quelques marches au-dessus d’une cave voutée et un escalier extérieur à son extrémité (2).
J.A. Loir-Mongazon, en qualité de Curé constitutionnel, prit possession des lieux en 1791. A la cessation du culte, en 1793, il abdiqua et embrassa une carrière militaire, avant de revenir acheter, en 1796, l’église et le presbytère (3) comme biens nationaux. Marié et devenu notaire, il fut maire de Juigné jusqu’en 1815 avant d’être emprisonné à la Restauration. Quant au Presbytère, il servit de mairie jusqu’en 1838.
Salle de la Mairie – Collection particulière
La Duchesse de Sutherland, Lady Millicent Hawes, qui s’illustra par la création d’hôpitaux de campagne durant la 1e Guerre Mondiale, vécut principalement en France et acquit le Presbytère en 1927 qu’elle occupa jusqu’en 1934. Elle fit électrifier l’édifice et dessiner par le paysagiste Lepage le parc et un mini jardin à la Française traçant 3 fleurs de Lys. Deux stèles mortuaires rappellent l’attachement de la Duchesse à deux de ses chiens (4).
Elle fut, peut-être par coquetterie personnelle, à l’initiative du nom “monastère”, mais ce bâtiment n’a en réalité jamais été un lieu monastique.
Duchesse de Sutherland par Lallie Charles – négatif sur verre entier, 1906 NPG x68967
Liée à la famille royale d’Angleterre, la Duchesse y reçut son cousin le Prince de Galles, futur-Edouard VIII, qu’elle hébergeait dans une suite baptisée depuis “Chambre du Roy”.
La configuration actuelle des extérieurs reflète ces aménagements du 20e siècle, durant lequel fut ajoutée un extension à chacune des extrémités de l’édifice.
Au sud, une cour de dalles d’ardoises est traversée par une allée de pavés de grès reliant le portail à l’entrée principale. A l’est, un ancien potager a été redessiné – selon un plan de l’Abbaye de Cluny datant de 1700 – en jardin d’inspiration médiévale.
Une charmille descend le long de la venelle et débouche, à travers le jardin d’agrément, sur le jardin à la Française surplombé par la terrasse nord du Presbytère. A l’ouest, une porte ouvre sur une ancienne perrière désormais verger avec allée bouquetière. Enfin l’ancien cimetière au pied de l’église cerne le chœur de celle-ci agrémentée de quelques fruitiers.
Ce petit domaine, où le schiste affleure, comporte 3 puits : l’un dans la cour, le second dans l’ancien potager, le troisième dans l’une des tourelles flanquantes surplombant le Vieux Louet.
Un majestueux chêne pédonculé ombrage la cour sud et quelques cyprès pluri-centenaires témoignent d’aménagements paysagers anciens.
Texte : B. Zeller, propriétaire des lieux.
Plan du presbytère et des jardins – Abbé Colasseau 1961
Archives Départementales 49
Philippe était à l’époque un prénom féminin.
Archives Départementales 49 – 1 B 992
Collection CEPAJE
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